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Archives départementales de la Côte-d'Or

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Juillet - Un faire-part de décès, il y a 250 ans

G 3640

Le « placard » du décès de Claire Guinier, veuve de Michel Harpet, bourgeois de Dijon, en 1766, est conservé dans les archives de la paroisse Saint-Philibert, où il fut réutilisé comme brouillon le lendemain des obsèques. Son texte est empreint de courtoisie, l’expression du deuil étant cantonnée dans l’initiale gravée décorée de larmes et de têtes de mort.


FRAD021_9FI_21231_00542Le terme de « faire-part » n’est pas attesté avant le XIXe siècle ; en 1766, au moment du décès de Claire Guinier, veuve Harpet, on employait plutôt celui de « lettre de part ». L’idée est d’inviter les proches et les relations à « prendre part » au deuil de la famille. Le lexique n’est pas celui de la peine ou de la tristesse, mais celui de la courtoisie :
« Messieurs et Mesdames »,
« très-humblement »,
« honneur »,
« s’il lui plaît ».
Non que Jeanne-Marie (veuve de Nicolas Masson) et Claude (religieuse hospitalière), les deux filles de Claire Guinier, la défunte (veuve de Michel Harpet), manifestent ainsi leur indifférence au décès de leur mère, le 4 juin, à l’âge de 78 ans. Mais c’est plutôt que la mort fait partie de la vie, et que le « convoi et enterrement » (dans l’église) du 5 juin 1766, pour ces dames (une veuve et une religieuse) de la bourgeoisie dijonnaise, est un acte de la vie sociale. Ces obsèques sont célébrées en présence du curé Pierre et des prêtres mépartistes (qui assuraient les messes de fondation).


Le texte est imprimé ;l’initiale « V » est, quant à elle, gravée sur bois : la lettre proprement dite est entourée de larmes et de têtes de morts reposant sur deux tibias en sautoir. Seul ce décor de pompe funèbre induit une idée de deuil. Ceux qui prendront part au deuil sont sobrement invités à réciter, pour le repos de l’âme de la défunte, « un De Profundis. » Il s’agit du psaume 130, chanté au moment de la levée du corps :
FRAD021_9FI_21231_00591« De profundis clamavi ad te Domine » :
« Des profondeurs je crie vers vous Seigneur. Seigneur écoutez mon appel. Que votre oreille se fasse attentive au cri de ma prière. Si vous retenez les fautes, Seigneur : Seigneur, qui donc subsistera ? Mais près de vous se trouve le pardon, et à cause de votre Loi, j’espère en Vous, Seigneur. J’espère dans le Seigneur, mon âme
espère en sa parole. Mon âme attend le Seigneur, plus que les veilleurs l’aurore ; qu’Israël espère dans le Seigneur. Puisqu’auprès du Seigneur est la grâce, près de lui l’abondance du rachat. C’est lui qui rachètera Israël de toutes ses fautes. »
C’est la prière du défunt qui, depuis les profondeurs où il est enterré, implore la miséricorde de son Sauveur.


L’église Saint-Philibert fut désaffectée à la Révolution. Depuis, elle n’a pas trouvé d’affectation définitive. Elle est trop ancienne, trop belle et trop remarquable pour être démolie ; trop proche de la cathédrale pour trouver un usage cultuel ; trop endommagée pour être facilement restaurée. Elle est entre-ouverte à certaines occasions (journées du patrimoine, par exemple).


G 3640Ce document, d’origine privée, se trouve pourtant dans les archives de la paroisse Saint-Philibert : l’examen de son verso montre qu’il ne doit sa conservation qu’à sa réutilisation, dès le lendemain de l’enterrement, pour établir le brouillon d’un texte. Le « vendredy 6 juin », le doyen décide que trois caisses contenant des archives devront être transportées chez le sieur Le Roy, vicaire de la paroisse Saint-Michel, pour y être ouvertes en présence de M. Finget, puîné, commis par la Chambre des Comptes pour en extraire tout ce dont ladite Chambre aurait besoin.


Une mention postérieure indique « L’inventaire a été fait le 9. » On imagine fort bien que le rédacteur de ce brouillon a pris pour gribouiller ce texte le papier qu’il avait sous la main : en l’occurrence le placard de décès de l’enterrement de la veille. Habent sua fata libelli : Les papiers ont leur destin. C’est, paradoxalement, grâce à la désinvolture du clergé de Saint-Philibert à l’endroit de la défunte enterrée la veille que l’on a conservé la mémoire des derniers honneurs qui lui furent rendus…

ADCO, G 3640

 

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